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Les représentations humaines
Les attitudes des sujets
Le troupeau des bouquetins (saisonnalité)
Les anneaux
L'art pictural
Cartographie de la couleur sur les panneaux des bouquetins
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Aurélie Abgrall.
L’une des originalités de l’art pariétal du Roc-aux-Sorciers réside également dans l’existence d’un art pictural associé aux sculptures et aux gravures pariétales. Si des vestiges de peinture ont été signalés dans plusieurs abris sculptés magdaléniens, ceux du Roc-aux-Sorciers sont les mieux conservés et la couleur joue un rôle qui n’est attesté pour le moment sur aucun autre site. Ces traces ont maintes fois interpellé Suzanne de Saint-Mathurin et Dorothy Garrod, qui se plaisaient à imaginer une frise sculptée coloriée à l’époque magdalénienne. Cependant, la ponctualité des vestiges picturaux ne tend pas à confirmer cette hypothèse, toujours en vogue aujourd'hui1.
Le rôle de la couleur intégrée à la sculpture pariétale animalière
1 - Teinte plate noire rehaussant le bas de la patte antérieure gauche du bouquetin (Bo8)
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Aurélie Abgrall.
2 - Teinte plate rouge clair appliquée dans le champ périphérique du vieux bouquetin (Bo3)
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Aurélie Abgrall.
3 - Bâtonnet rouge foncé tracé sur la bouquetine (Bo4)
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Aurélie Abgrall.
Sur la paroi de l’abri Bourdois, la couleur, rouge et noire, est à l’heure actuelle uniquement attestée sur la zone figurative des bouquetins. Si les différents vestiges de couleur noire apparaissent de teintes homogènes sur le site, ce n’est pas le cas de la couleur rouge qui, sur la paroi, est déclinée en deux teintes différentes : un rouge clair, tirant sur le rose, et un rouge plus foncé, tirant tantôt sur le brun, tantôt sur l’orangé. Ces couleurs et teintes ont été utilisées différemment par les artistes magdaléniens du site : parfois superposée, parfois juxtaposée à la sculpture, la couleur rouge foncé dessine des signes simples (ponctuations, bâtonnets) et complexes (lignes pointillées), la couleur rouge clair a été appliquée en grandes teintes plates, peut-être antérieurement aux signes, tandis que le noir rehausse le bas des pattes de certains bouquetins mâles par teintes plates.
Outre ce rôle différentiel des teintes, l’observation des œuvres en place et sur blocs de l’abri Bourdois et de la cave Taillebourg révèle que le rôle de la couleur varie également en fonction de la thématique et de la technique à laquelle elle est associée.
Intégrée à la sculpture pariétale animalière, la couleur ne participe pas à la figuration, rôle déjà assuré par la sculpture, mais semble remplir une fonction bien à elle en apportant des touches abstraites à l’ensemble sculpté.
En revanche, lorsqu’elle est associée à des reliefs anthropomorphes, elle participe étroitement à la figuration et constitue de ce fait un coloriage.
La couleur s’exprime également différemment lorsqu’elle est associée à la gravure : sur les blocs effondrés de l’abri Bourdois qui ont bénéficié d’un relevé analytique, la couleur noire, ponctuelle, semble avoir été appliquée en bande soulignant la ligne ventrale de bisons gravés, tandis que la couleur rouge est appliquée en grande teinte plate amorphe, antérieure et/ou postérieure à l’exécution des gravures fines, ou alors dessine des signes quadrangulaires superposés à des gravures de bisons. Bien que des signes quadrangulaires rouges et noirs soient connus dans l’ensemble du domaine franco-cantabrique, ceux de l’abri Bourdois semblent par leur composition propres au Roc-aux-Sorciers.
Ces données amènent à s’interroger sur le rapport des Magdaléniens du Roc-aux-Sorciers à la couleur. L’observation des matières colorantes découvertes dans les niveaux du Magdalénien moyen, ainsi que les multiples taches et poches d’« ocre » et la « couche ocrée » RSE remarquées lors des fouilles semblent témoigner d’une utilisation intensive qui a pu concerner diverses sphères d’activités (domestique, artistique). L'importance qui semble accordée à la couleur n'est pas surprenante : en effet, sollicitée par toutes les sociétés humaines, aussi bien du passé que du présent, la couleur est un élément de communication, porteur de sens et d'identité, partagé par les individus d'un même groupe culturel.
L’art pictural associé à la sculpture pariétale animalière
L’art pictural associé aux gravures fines pariétales
L’art pictural associé aux représentations humaines
1 A. Abgrall, « La place et le rôle de l’art pictural dans la sculpture pariétale de l’abri Bourdois, site du Roc-aux-Sorciers », mémoire de master 2, spécialité préhistoire, université Paris I Panthéon-Sorbonne, 2007, 2 vol., 56 et 34 p., ill.
Auteur : Aurélie Abgrall
© Réunion des musées nationaux – 2009