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Les fouilles de Suzanne de Saint-Mathurin au Roc-aux-Sorciers ont livré plusieurs restes de petits vertébrés de « grande taille ». Nous avons pu effectuer des prélèvements dans la coupe stratigraphique de l’abri Bourdois dans l’espoir de récolter des restes appartenant à de plus petites espèces ; malheureusement, peu de matériel a pu être collecté.
Alors que la cave Taillebourg a donné les restes d’un nombre minimum d’individus (NMI) de 43, l’abri Bourdois a donné un NMI de 158, provenant essentiellement des fouilles. Ces vestiges ne représentent donc pas un bon échantillonnage du cortège des individus qui devait réellement exister dans le remplissage. La fouille a permis de récolter les restes les plus visibles, donc les plus gros ; on constatera ainsi que les restes de spermophiles sont abondants mais il n’est pas impossible que l’activité des chasseurs magdaléniens soit également, au moins en partie, responsable de leur présence.
Dans la cave Taillebourg, 5 espèces ont été reconnues : le lemming à collier, le campagnol des hauteurs, le spermophile, le campagnol des champs et le campagnol terrestre. Les 2 premières sont les mieux représentées (NMI de 20 pour le lemming et de 19 pour le campagnol des hauteurs).
Dans l’abri Bourdois ont été identifiées 9 espèces : le campagnol nordique, le campagnol des champs, le campagnol terrestre, le campagnol roussâtre, le campagnol agreste, le mulot sylvestre, le lemming à collier, le campagnol des hauteurs et le spermophile. Les 3 dernières sont les mieux représentées (NMI de 24 pour le lemming, de 19 pour le campagnol des hauteurs et de 101 pour le spermophile).
Le cortège de la couche TCC de la cave Taillebourg dénote un climat très froid au moment de la mise en place des sédiments. La présence conjointe du lemming à collier, qui fréquente plutôt les zones humides à végétation de type toundroïde, et du campagnol des hauteurs, qui fréquente plutôt les espaces très froids et très secs battus par les vents, atteste que les plateaux qui surmontent les vallées de l’Anglin et de la Gartempe sont alors des plateaux très froids, porteurs d’herbacées et pratiquement dépourvus d’espèces arbustives. En revanche les fonds de vallée, qui présentent des zones plates avec de place en place des zones humides, sont habités par les lemmings à collier. Il ne semble pas que ces fonds de vallée abrités aient possédé quelque végétation arborée puisque les espèces associées à ce type de milieu ne sont pas présentes.
Le cortège de la couche RSD de l’abri Bourdois étant extrêmement proche de celui de la couche TCC de Taillebourg, nous ferons une description du paysage évidemment identique à celui de l’épisode de cette couche.
Comme la couche RSC est pauvre en restes, nous pouvons émettre l’hypothèse d’un radoucissement du climat. La pauvreté d’une couche en restes d’une espèce n’est pas la preuve que cette espèce est rare dans l’environnement du site ; en effet, cette pauvreté peut être due à d’autres facteurs. Cette hypothèse est évidemment très fragile puisque la collecte du matériel n’a pas été réalisée de façon systématique au moment de la fouille, et pour ce qui est des prélèvements que nous avons effectués nous-mêmes, ils n’ont donné que trop peu de matériel. Bruno Bastin1 situe une oscillation tempérée qu’il appelle « oscillation d’Angles » au niveau de cette couche RSC. Notre apport à la confirmation ou à l’infirmation de cette proposition est d’un poids bien léger.
Les épisodes correspondant aux couches RSB4/B5 et RSB4, si on les situe par rapport à l’épisode de la couche RSD en excluant la couche RSC, montrent une réduction du froid mais surtout une augmentation très nette de l’aridité du climat. En effet, les espèces considérées comme attestant un climat plus tempéré n’apparaissent pas, ce qui n’est pas le cas du campagnol des hauteurs qui réapparaît après une « éclipse » en RSC et RSB5. Cette aridité plus forte n’entraînant évidemment pas l’arrivée des arbres et des arbustes, le paysage est toujours aussi très largement ouvert.
Les couches RSB3 et RSB2 se mettent en place dans un milieu et sous des conditions climatiques très voisines de celles des épisodes précédents (RSB4/B5 et RSB4) ; cependant, si l’aridité est toujours aussi grande, on peut penser qu’il n’en est pas de même pour la température qui continue de se radoucir très progressivement. Des arbres de petite taille, des bosquets, commencent à apparaître dans les zones les mieux abritées.
Enfin, l’épisode correspondant à la mise en place de la couche RSB1 est la continuité de l’évolution amorcée précédemment ; l’aridité du climat est de moins en moins importante puisque même le mulot sylvestre apparaît. Il atteste la présence de bosquets et de petits bois. Pour ce qui est de la température, elle continue de se radoucir, permettant à des espèces de climat tempéré d’apparaître, comme par exemple le campagnol agreste ou le campagnol roussâtre.
De la base au sommet du remplissage, on assiste donc à une diminution du froid, qui est vraiment très intense au début de l’occupation du site (Magdalénien moyen). Cette réduction du froid s’accompagne d’une augmentation très nette de l’aridité dès la base de la couche RSB, et ceci avec l’installation des hommes du Magdalénien supérieur. Ensuite, progressivement, le climat se radoucit encore et perd de son aridité pour tendre vers une ambiance tempérée mais encore assez sèche, puisque le spermophile est encore présent même au sommet du remplissage (Magdalénien supérieur).
1 B. Bastin, « Mise en évidence d’une oscillation tempérée correspondant au Magdalénien III d’Angles-sur-l’Anglin (Vienne) », C.R. Académie des sciences de Paris, t. 280, série D, 1975, p. 1353-1356.
Auteur : Jean-Claude Marquet
© Réunion des musées nationaux – 2010