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Pour mieux comprendre la place de l’homme préhistorique dans son milieu naturel, il est nécessaire de décrire l’environnement géologique, proche ou éloigné de la région d’Angles-sur-l’Anglin. Le relief et la végétation sont étroitement liés à la nature du sous-sol ; la lumière et les ombres sont engendrées par les reliefs ; quant aux pierres et aux minerais, ils sont directement issus de l’environnement rocheux. Il est par conséquent nécessaire d’évoquer les formations géologiques allant du nord du Massif central jusqu’au sud de la Touraine : socle paléozoïque, séries sédimentaires du Jurassique, du Crétacé et du Tertiaire. À partir de cette synthèse de la géologie régionale, quelques sites préhistoriques du sud du Bassin parisien peuvent alors être replacés dans leur cadre géologique.
À la fin du Paléozoïque, il y a environ 300 millions d’années, une haute chaîne de montagnes s’étendait sur l’Europe moyenne : la chaîne varisque. Intensément soumise à l’érosion jusqu’au début de l’ère secondaire, ses vestiges se suivent sur la bordure nord du Massif central, représentés par les formations magmatiques et métamorphiques du plateau d’Aigurande, extrémité septentrionale du plateau de La Marche.
Au cours du Quaternaire, l’érosion de ces roches et des filons de quartz par les rivières au cours de leur creusement (Creuse, Anglin) a fourni des matériaux sous forme de galets. Dans la haute vallée de la Creuse, des fouilles menées à Pont-de-Lavaud ont mis en évidence une industrie archaïque sur galets de quartz d’une grande fraîcheur, datée de 1,1 à 1,2 million d’années.1
Sur le site du Roc-aux-Sorciers, les galets, très abondants, constitués de différents types de roches du socle paléozoïque, proviennent des alluvions de l’Anglin.
Au début de l’ère secondaire, sur les reliefs émergés et pénéplanés, la transgression marine mésozoïque dans le Bassin parisien débute par des sédiments détritiques plus ou moins grossiers. Ils s’observent en particulier dans le bassin de Chéniers-Dunet-Chaillac où ils ont été minéralisés en fluorine, barytine, fer, manganèse.
Durant tout le Lias, les dépôts sont franchement marins. Les calcaires et les argiles sont parfois riches en céphalopodes et brachiopodes. Ces fossiles ont-ils été remarqués par l’homme préhistorique et retenus comme éléments de parure au même titre que les fossiles des faluns de Touraine ?
Le Dogger est la période où se mettent en place d’importantes plates-formes carbonatées marines sensibles à l’érosion karstique lors de périodes d’émersion.
Le Bajocien inférieur est constitué de calcaires à silex et de dolomies cristallines, en bancs peu épais et très irréguliers. Ces formations carbonatées affleurent bien en petites falaises et ont été souvent fortement affectées par l’érosion karstique. C’est dans ces niveaux que se développe l’ensemble de petites grottes et abris-sous-roche sur la commune de Lussac-les-Châteaux.
Ces calcaires n’ont pas permis l’exécution de sculptures comme au Roc-aux-Sorciers. À La Marche, l’« art » s’est exprimé sur des plaquettes de calcaire et des dolomies d’origine locale, mais aussi, semble-t-il, sur des éléments de roches sédimentaires et métamorphiques d’origine exogène.
Au Bajocien terminal, un événement tectonique provoque une baisse du niveau marin conduisant à des dépôts évaporitiques : c’est la formation des brèches à rosettes de calcite bien développées dans la région d’Argenton-sur-Creuse. Facilement karstifiée, cette formation peu cohérente renferme de nombreuses grottes, dont la grotte de la Garenne (Saint-Marcel, Magdalénien moyen), près d’Argenton-sur-Creuse.
L’Oxfordien supérieur est représenté par des calcaires récifaux qui forment les beaux escarpements rocheux des vallées de la Creuse, en aval du Blanc et de l’Anglin. Intensément karstifiés, ces calcaires renferment de nombreuses grottes, dont l’ensemble du Roc-aux-Sorciers. La géologie détaillée de ce site a été traitée dans la partie « Contexte géologique ».
Dans la même formation géologique s’ouvrent plusieurs autres grottes livrant des traces d’occupations préhistoriques au cours du Paléolithique. Près de Saint-Pierre-de-Maillé, la grotte des Cottets est creusée dans le récif corallien. Dans la vallée de la Creuse, l’abri Fritsch (Pouligny-Saint-Pierre, Solutréen moyen à Badegoulien) a livré une industrie lithique et une faune abondante.
Le Turonien est caractérisé par les tuffeaux à bancs de silex qui ont alimenté les exploitations réputées du Grand-Pressigny. Un seul site de falaise d’importance est situé sur la commune de Saint-Rémy-sur-Creuse (« Les Palets de Gargantua », Magdalénien supérieur).
Au très ancien Paléolithique, Anglin, Creuse, Gartempe commençaient à peine le creusement de leurs vallées. Les cours d’eau étaient divagants sur des plateaux non encore profondément incisés. L’homme s’installait sur les terrasses alluviales aujourd’hui situées sur les plateaux. Les rivières se sont enfoncées progressivement, atteignant les niveaux calcaires résistants soumis à l’érosion karstique. C’est la période de mise en place des grottes dans le Bassin parisien. L’homme préhistorique a été intimement lié à son environnement géologique, lui-même lentement façonné par l’érosion.
1 J.Despriée, R.Gageonnet et P. Voinchet, « Le site préhistorique du Pont-de-Lavaud », in : Préhistoire du Val de Creuse en Berry, dir. par Patrick Paillet, musée Archéologique d'Argentomagus, 2004, p. 25-26.
Auteurs : Jacqueline Lorenz, Jean-Pierre Gély
© Réunion des musées nationaux – 2010