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À l’image de la richesse du site du Roc-aux-Sorciers à Angles-sur-l’Anglin (Vienne, France), ce catalogue est le fruit d’un travail collectif réalisé sur plusieurs années, rassemblant des spécialistes issus de différents laboratoires ou centres de recherche. Chacun a mis à contribution ses compétences en regard de celles des autres pour proposer une analyse partagée de ces sociétés du passé, qui nous ont laissé une œuvre d’art échappant encore aujourd’hui au temps.
En parallèle aux différents volumes de la monographie du Roc-aux-Sorciers1, ce catalogue en ligne présente le mobilier archéologique issu des fouilles de Lucien Rousseau (1927-1939) et de Suzanne Cassou de Saint-Mathurin (1947-1964). Ce mobilier rassemble aussi bien des vestiges de la vie quotidienne des occupants magdaléniens du site que des témoignages artistiques ou tout au moins symboliques.
À la différence des grottes profondes comme Lascaux (Montignac, Dordogne) ou Chauvet (Vallon-Pont-d’Arc, Ardèche), les abris-sous-roche ornés ont la particularité d’associer art pariétal et vestiges d’occupations humaines. L’étude du gisement du Roc-aux-Sorciers est donc, comme celle des rarissimes abris-sous-roche ornés magdaléniens actuellement connus, d’un grand intérêt pour la compréhension de la relation que pouvaient entretenir les Magdaléniens avec leur art pariétal. Ces sites doivent-ils être perçus comme des sanctuaires et/ou comme des habitats ?
Parce qu’il fut découvert dans son contexte archéologique, le Roc-aux-Sorciers constitue un site d’art pariétal exceptionnel. Cette conjoncture permet non seulement de bien dater les œuvres pariétales, au-delà d’une approche stylistique quelquefois trop aléatoire, mais aussi d’aborder le comportement des Hommes du Paléolithique. L’art pariétal associé à un sol habité constituent les meilleures conditions d’appréhension de la place de leur système symbolique vis-à-vis de leur vie quotidienne.
Quel était, il y a 15 000 ans, le rôle de cet art ainsi associé à l’occupation magdalénienne ? Quels rapports entretenaient les Magdaléniens avec cet art ? Était-ce un art lié au vécu quotidien, ou plutôt à des actes exceptionnels ?
Analyser le rapport des Magdaléniens à leur art implique une bonne connaissance de l’occupation du site et donc une étude approfondie de son mobilier archéologique et de son contexte environnemental.
Sol d'habitat associé à la paroi sculptée, gravée et peinte de l'abri Bourdois pendant les fouilles de Suzanne de Saint-Mathurin
© MAN, ill. Suzanne de Saint-Mathurin.
Le site du Roc-aux-Sorciers permet, d’une part, des datations absolues sur le matériel issu des fouilles2 et, d’autre part, des datations relatives et une approche stratigraphique, ainsi qu’une analyse fonctionnelle du site à partir des vestiges archéologiques et de leur répartition sur le site. La répartition spatiale des vestiges peut être abordée de façon ponctuelle à partir des carnets de fouilles de Lucien Rousseau et de Suzanne de Saint-Mathurin.
Aux études archéologiques classiques et paléoenvironnementales s’ajoute un volet fondamental, celui de l’étude approfondie de l’art pariétal et mobilier, domaine particulièrement riche à Angles-sur-l’Anglin.
Panneaux des bouquetins de l'abri Bourdois
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Alain Maulny.
La frise sculptée encore in situ est décrite en prenant en compte nos nouvelles observations, notamment l’interprétation des vestiges de sculptures liés à des phénomènes de retaille.
Le plafond sculpté, gravé et peint, effondré en « mille morceaux », dont plusieurs raccords ont pu être réalisés, est présenté pour la première fois. Cet ensemble conséquent de blocs, dont l’étude se poursuit encore actuellement, est décrit et sera complété au fur et à mesure de l’avancement des recherches. Déjà, l’étendue, la nature et les qualités de cet art en plafond prennent toute leur mesure.
L’étude de l’art mobilier du Roc-aux-Sorciers n’a été que très peu développée jusqu’à présent. Cependant, son analyse conduit progressivement à mieux comprendre le site, à envisager d’autres aperçus aussi bien dans le choix des figures représentées, de leurs techniques et de leurs supports de représentation que dans leur localisation et leur état d’« abandon » sur le site. L’usage de la parure et celui de l’art mobilier ouvrent à travers leur fonction sur d’autres aspects de la vie des Hommes du Magdalénien, touchant autant à leurs activités domestiques qu’à leur mode de pensée .
La première approche de ce domaine est intra-site mais elle est élargie au contexte régional, et à l’échelle européenne pour ce qui est des occupations magdaléniennes et de la fonction des sites qui s’y rapportent.
En mettant à profit notre analyse sur d’autres sites à sculptures pariétales, nous constatons de fortes affinités entre eux. Le rapprochement de ces sites magdaléniens pose la question de leur fréquentation par un seul et même groupe culturel et renvoie à la notion de « territoire culturel ».
Le Magdalénien moyen offre une grande diversité culturelle sur un large espace. Les particularismes des symboles graphiques conduisent à subdiviser ces aires fréquentées par l’Homme et à tenter des approches territoriales plus fines, à l’échelle de groupes plus restreints. Le site du Roc-aux-Sorciers constitue un gisement essentiel pour appréhender, pour ces périodes reculées, ces micro-sociétés nomades.
1 L. Iakovleva, G. Pinçon, Angles-sur-l’Anglin (Vienne). La Frise sculptée du Roc-aux-Sorciers, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, Réunion des musées nationaux, 1997, 168 p., 173 fig. ;
G. Pinçon [dir.], Angles-sur-l’Anglin (Vienne). Le Roc-aux-Sorciers : ses occupants les Magdaléniens et leur rapport à l’art, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, 2011, à paraître ;
G. Pinçon [dir.], Angles-sur-l’Anglin
(Vienne). Le Roc-aux-Sorciers : paléoenvironnements
et industries,
Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques,
2011, à paraître.
2 L. Iakovleva, G. Pinçon, Angles-sur-l’Anglin (Vienne). La Frise sculptée du Roc-aux-Sorciers, Paris, Comité des travaux historiques et scientifiques, Réunion des musées nationaux, 1997, 168 p., 173 fig., p. 14.
Auteur : Geneviève Pinçon
© Réunion des musées nationaux – 2009, mise à jour 2010.