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Bachelière à 17 ans, elle décide contre la volonté paternelle de faire des études de médecine, et quitte la Saintonge en 1921. Elle prépare et obtient une licence d’enseignement des sciences naturelles. Pratiquant l’anglais dès sa petite enfance avec sa mère, elle part comme lectrice à St Hilda’s College (université d’Oxford) et prépare en quatre ans, sous la direction de Rudler, une thèse sur « l’influence des idées biologiques de Diderot sur son œuvre romanesque ». Elle étudie notamment la correspondance échangée entre Denis Diderot et Catherine II. Elle soutient sa thèse en 1931, et reçoit le titre de Bachelor of Letters, équivalant alors à notre doctorat d’université. C’est dans le cadre de ce travail qu’elle s’intéresse à Erasme Darwin, grand-père de Charles Darwin, et aux problèmes de l’origine de l’humanité.
Par sa rencontre avec l’abbé Breuil en 1932, elle s’oriente plus spécialement vers la préhistoire, en classant avec lui les collections d’art préhistorique du Muséum d’histoire naturelle de Bordeaux, en particulier les collections de Pair-non-Pair (Prignac-et-Marcamps, Gironde). Une solide amitié se forge, et elle visite avec lui de nombreuses grottes ornées en France et à l’étranger.
À l’occasion du quatre-vingtième anniversaire de l’abbé, elle coordonne l’édition chez Protat de sa bibliographie, publiée sous la direction de Raymond Lantier, conservateur en chef du MAN. Elle prend une part importante à la rédaction de deux volumes que publie l’abbé Breuil sur l’Afrique du Sud. À la mort de l’abbé en 1961, elle publie avec des collaborateurs les gravures rupestres de la Rhodésie sous le nom de ce dernier.
L’expression d’une complicité sans faille entre Suzanne Cassou de Saint-Mathurin (à gauche), Dorothy Garrod (au centre) et Germaine Henri-Martin (à droite) lors d’un repas partagé
© MAN, fonds Saint-Mathurin.
C’est l’abbé Breuil qui l’invite à partir avec Dorothy Garrod étudier les grottes de Palestine. Elle publie en association avec des chercheurs anglais « Adlun in the Stone Age, the excavation of D.A. Garrod in the Lebanon » ed. by D. Roe, dans B.A.R. International Series n° 159, en 1983.
Elle rencontre également Germaine (Minne) Henri-Martin et participe aux fouilles de la Quina (Charente), puis à la fouille de Fontéchevade.
Après avoir visité la grotte de La Marche à Lussac-les-Châteaux avec l’abbé Breuil, elle décide de reprendre les recherches sur le site du Roc-aux-Sorciers en 1946 en associant Dorothy Garrod qui accepte de fouiller avec elle. Elles découvrent ensemble les sculptures pariétales. Elles bénéficient de subventions de la Wenner-Gren Foundation de New-York. Pour les besoins de la fouille, elle arme un bateau à La Rochelle, utilise ses talents de dessinatrice et crée des modèles pour le Bon Marché à Paris. Après le décès de Dorothy Garrod en 1968, Suzanne de Saint-Mathurin continue l’analyse de ses fouilles.
À la fin des années soixante, Suzanne de Saint-Mathurin est nommée chargée de mission au musée d’Archéologie nationale. En 1976, elle fait don au musée d’une sélection de blocs sculptés, gravés et peints provenant du plafond effondré du gisement. Ces blocs sont encore actuellement présentés au musée.
Suzanne Cassou de Saint-Mathurin collabore sur le terrain et pour les publications, bien qu’elle n’en ait signé que très peu. Chevalier de l’ordre national du Mérite, Fellow of the Society of Antiquaries of London, elle décède le 28 août 1991 en léguant le gisement à l’État et l’ensemble de ses collections et archives au musée d’Archéologie nationale.
Suzanne Cassou de Saint-Mathurin nous laisse une découverte exceptionnelle : l’abri sculpté magdalénien du Roc-aux-Sorciers. Par cette publication qu’elle aurait tant voulu mener à terme elle-même, nous rendons hommage à cette femme de caractère, fidèle en amitié et cependant modeste, ne cherchant pas les honneurs.
1 Nous tenons à remercier vivement Madeleine Blondel pour tous les éléments qui nous ont permis d’établir ce portrait de son amie Suzanne de Saint-Mathurin.
Auteur : Geneviève Pinçon
© Réunion des musées nationaux – 2009