MAN 86828 120 — BDD 120
Le Roc-aux-Sorciers, abri Bourdois.
Calcaire jurassique oolithique.
Long. max. : 40,5 cm ; L. max. : 50 cm.
Bloc de calcaire effondré ; bon état.
Collection Saint-Mathurin.
Technique : sculpture, gravure fine, peinture rouge.
À première vue, les gravures sont nombreuses, fines et assez éparpillées, sauf près de la fracture (zone inférieure du bloc) où l’on remarque un groupe d’incisions assez concentrées, de profondeur et de nature variées. La présence des gravures fines et moyennes dans cette partie du bloc confirme l’idée d’une surface assez ancienne, où les gravures ont été sauvegardées à travers le temps.
On peut considérer deux registres pour les gravures : un registre inférieur (zone la plus chargée) et un registre supérieur (quelques incisions éparses). La présence du groupe de traits gravés dans le registre supérieur (sur la partie très écaillée notamment) vient compliquer la lecture. En effet, bien qu’une grande écaille endommage une grande partie de la zone gravée, la présence de ces quelques traits montre que cette partie fut décorée après l’éclat. D’une manière générale, les gravures sont fines voire très fines, quelques-unes présentant néanmoins une profondeur plus importante (registre inférieur). La plupart des gravures sont courtes, courbes ou longilignes, mais un groupe de traits assez marqués montre des tracés plus longs, qui se recoupent ou s’entrecroisent. Parmi ces ensembles d’incisions, plusieurs figures ont été repérées lors du relevé.
À la lecture du registre inférieur (concentration de gravures la plus importante), on peut dégager plusieurs formes, comme l’avant-train de deux animaux et la représentation isolée de segments anatomiques. Malgré une lecture des gravures difficile due à leur concentration, nous pouvons néanmoins reconnaître la silhouette d’un ours et celle d’un félin. L’ours présente un museau assez fin, avec le début de l’encolure. Sa forme est assez semblable à celle des ours que l’on trouve à La Marche (Lussac-les-Châteaux, Vienne). Il est essentiellement composé de gravures profondes, alors que le félin, très typique et proche également de ceux trouvés sur le site de La Marche, est plus particulièrement composé de gravures fines. Le félin utilise les mêmes traits que l’ours (au niveau du front), mais c’est au niveau du museau que l’on reconnaît l’animal. Il est en effet typique des félins, avec un museau presque carré, et le début de l’encolure. Ces deux figures sont donc intimement imbriquées, puisque les mêmes traits gravés servent à l’un comme à l’autre. L’œil est aussi utilisé pour les deux animaux. Cet élément anatomique se place comme pivot des deux représentations, et joue donc un rôle essentiel dans la représentation animale.
Le troisième ensemble de traits que l’on a pu dégager concerne deux détails anatomiques qui semblent isolés : d’une part, une barbe assez longue et projetée en avant, typique du contour de barbe des bisons d’Angles, placée sous l’encolure du félin/ours, et d’autre part, un groupe de traits figurant un « toupet », que l’on peut isoler sur la partie supérieure de l’ours. On note des traces de sculpture à droite de la zone gravée. Ces vestiges sculptés sont très partiels et très endommagés. De forme curviligne, ils sont de petites dimensions, et il est donc très difficile de les interpréter. Proviennent-ils d’une représentation effacée, incomplète, ou jamais terminée ? Ces questions restent posées. Ces reliefs particuliers peuvent aussi provenir d’interventions sur la paroi visant à la modifier, comme c’est le cas ailleurs sur la frise sculptée in situ. Il ne s’agirait donc pas de vestiges de sculpture, mais de vestiges de reliefs d’accroches de détachement. Ici, la surface est plus endommagée, plus irrégulière : on peut alors penser que le détachement du bloc était volontaire, dans le but peut-être de préparer la paroi pour d’autres interventions (phases des sculptures ?). Ces traces peuvent donc être soit des vestiges de sculpture, mais leur état de conservation ne permet pas d’aller plus en avant dans la détermination, soit des vestiges de modification volontaire de la paroi afin de détacher ce bloc.
La face supérieure du bloc conserve aussi des traces de colorations. La couleur très ocrée concerne la zone gravée (ours/félin), la zone sculptée et une partie du registre supérieur, à droite de la grande écaille. La couleur est associée aux surfaces gravées et sculptées, donc les parties les mieux conservées. La couleur devait être à l’origine très présente, au vu de sa distribution et de son intensité à certains endroits. La couleur varie de l’ocre rouge à un ocre plus brun. Ces tons sont très présents sur le site du Roc-aux-Sorciers. L’application en aplat de la couleur rouge s’avère bien différente des différents signes quadrillés rouges relevés sur blocs et sur la paroi et pourrait participer à la réalisation d’une figuration (?).
Ce bloc fait partie d’un groupe lapidaire de près d’une vingtaine de blocs de tailles diverses se trouvant sur la partie amont de l’abri Bourdois. Les bords du bloc sont entièrement fracturés anciennement, et une des limites de la face supérieure n’est pas une arête, mais une cassure très nette. Le bloc était donc très certainement rattaché à la paroi, avant de se détacher de celle-ci. Il est très détérioré par la mousse et par de nombreuses écailles récentes et/ou anciennes. La forme générale du bloc est assez trapézoïdale, avec plusieurs faces limitées par des zones de fracture. On peut discerner trois types de surfaces : une première assez écaillée, liée à des détachements assez importants (effondrement), une deuxième plus lisse présentant des écailles anciennes (vestiges de la surface d’origine ?), et une dernière zone plus complexe présentant une surface assez accidentée mais également des vestiges de sculpture. Par ces premières observations, on peut différencier trois zones distinctes : la première concerne les faces de détachement du bloc (zones d’éclatement), la seconde implique des zones de grandes écailles et éclatements liées peut-être à une chute, et enfin, la dernière zone concerne les surfaces d’origine, lisses et comportant de petits éclatements. C’est sur ces dernières zones que l’on observe les vestiges de gravure. La lecture des états de surface pourrait donc paraître aisée au premier abord, mais en regardant de plus près et en effectuant le relevé exhaustif, on se rend compte qu’il n’en est rien. La face étudiée présente bien des zones de failles et d’érosion différentes, mais les vestiges graphiques observés lors du relevé compliquent l’approche de ce bloc. L’état de surface présente des zones érodées qui impliquent des conservations différentes (surface d’origine conservée apte à recevoir les gravures et zones de fracture). On lit néanmoins des vestiges d’interventions humaines assez éparpillées, ce qui pose la question des interventions successives sur ce bloc au cours de son « histoire », et notamment sa période de détachement, volontaire ou non, pendant l’occupation au Magdalénien moyen. Les représentations gravées se superposent et s’imbriquent pour donner une forme commune, certainement voulue par le ou les artistes. L’image réalisée en gravures très fines ou profondes semble brouillée par des ajouts anatomiques segmentaires. Nous sommes, avec cet exemple, en contradiction totale avec le concept des sculptures monumentales que l’on peut observer sur la frise in situ. Cette ambivalence conceptuelle entre « art caché » (gravures fines, animaux finement gravés, figures composites et partielles) et « art monumental » (sculptures en bas relief et haut relief, figures souvent complètes) pose la question des différences dans le geste de création (quelles portées ? quels messages ?), mais aussi dans le sens pratique (d’un point de vue visuel, quelles places tiennent ces « arts » dans l’habitat ?). Si l’observation des états de surface et l’analyse de l’histoire figurative du bloc nous conduisent à penser à un détachement volontaire du bloc de la paroi, quelles significations se cachent derrière ce geste ? Ces questions trouvent leur écho dans l’étude de ce bloc, puisque les figures sont représentées très finement, et qu’il est fort probable que celui-ci ait été détaché de la paroi, peut-être pour créer des nouvelles zones à travailler sur la paroi.
Inédit.
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 127
Bloc sculpté et peint, BDD 128
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 129
Bloc gravé et peint à anneaux, BDD 331
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 138
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 147
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 127
Bloc sculpté et peint, BDD 128
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 129
Bloc gravé et peint à anneaux, BDD 331
Gravures fines et vestiges de sculptures et de peinture, BDD 321
Registre de gravures fines, BDD 292
Registre de gravures fines, BDD 322
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 127
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 129
Bloc gravé et peint à anneaux, BDD 331
Bloc sculpté et gravé sur deux faces, BDD 123
Bloc sculpté et gravé, BDD 137
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 138
Bloc sculpté et gravé, BDD 141
Bloc sculpté et gravé, BDD 142
Bloc sculpté et gravé, BDD 143
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 145
Bloc sculpté et gravé, BDD 146
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 147
Bloc sculpté, gravé et peint (dit « le Sorcier » ou « le Jocond »), BDD 152
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 166
Cheval sculpté (« cheval de la découverte »), BDD 235
Bison sculpté (« bison couché »), BDD 236
Cheval sculpté (« cheval inclinant la tête »), BDD 237
Bison sculpté (« bison en boule »), BDD 248
Tête humaine sculptée, BDD 249
Gravures fines et vestiges de sculptures et de peinture, BDD 321
Bouquetin sculpté (« bouquetin tournant la tête »), BDD 251
Bouquetin sculpté (« étagne », « bouquetine »), BDD 257
Tête de capridé sculptée, BDD 268
Tête d’équidé sculptée, BDD 271
Vestiges de sculptures, BDD 284
Bison sculpté in situ, BDD 121
Animal indéterminé sculpté in situ, BDD 122
Bloc sculpté et gravé sur deux faces, BDD 123
Bloc sculpté monumental, BDD 124
Bloc sculpté et gravé, BDD 137
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 138
Bloc sculpté et gravé, BDD 141
Bloc sculpté et gravé, BDD 142
Bloc sculpté et gravé, BDD 143
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 145
Bloc sculpté et gravé, BDD 146
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 147
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 149
Bloc sculpté et peint, BDD 151
Bloc sculpté, gravé et peint (dit « le Sorcier » ou « le Jocond »), BDD 152
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 166
Bloc sculpté et gravé, BDD 167
Bloc sculpté et gravé, BDD 168
Bloc sculpté, gravé et peint, BDD 169
Bloc sculpté et gravé, BDD 170
Bloc sculpté et gravé, BDD 171
Geneviève Pinçon, Aurélie Abgrall, Camille Bourdier, Oscar Fuentes
Dernière modification de la notice : 2008-04-04
© Réunion des musées nationaux – 2009
Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : cliché de la face ornée..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé analytique complet de la face ornée..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé des gravures fines..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé sélectif des gravures fines du registre inférieur formant une hypothétique tête d’ours..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé sélectif des gravures du registre inférieur formant une hypothétique tête de félin..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé sélectif des gravures fines du registre inférieur formant des éléments figuratifs partiels hypothétiques..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé des éléments sculptés..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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Bloc 12 de l’abri Bourdois (BDD 120) : relevé de la peinture rouge..
© Geneviève Pinçon, ministère de la Culture, ill. Charles Warroux, Oscar Fuentes, 2005.
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